La Dordogne au naturel
La Dordogne au naturel
D’Urval à Mauzac • En pénétrant en Pays de Bergerac à la hauteur du village d’Urval, fier de son église fortifiée et d’un four banal remarquable, la Dordogne s’élargit et se fait plus langoureuse. Entre Le Buisson-de-Cadouin et Lalinde, ses eaux claires ont patiemment sculpté la roche jusqu’à y former de magnifiques méandres bordés de falaises : les cingles de Limeuil et de Trémolat. Paysages grandioses, panoramas majestueux sur les plaines d’Alles-sur-Dordogne et de Calès : au creux de ces deux boucles, quasi parfaites, les cultures de tabac, fraise, maïs, blé ou tournesol dessinent un ‘patchwork’ aux couleurs changeantes. À Limeuil, classé parmi les plus beaux villages de France, la Dordogne se gonfle des eaux de la Vézère. Du haut du parc panoramique, là où se trouvait le château fort, on peut admirer les toitures et les rues du village dégringolant en cascade vers le confluent, qui fut lieu portuaire stratégique au temps de la batellerie.
Prévoyez une halte prolongée à Trémolat, le temps d’admirer les coupoles et peintures murales de l’église abbatiale avant d’emprunter la route pittoresque qui conduit au panorama de Rocamadou. Au pied de la falaise, la rivière offre le gîte et le couvert à une gent ailée fort nombreuse car l’endroit est tranquille : canard, héron, milan, martin-pêcheur, cormoran, grèbe, aigrette... Et voici le vaste plan d’eau de Mauzac, là où la Dordogne bute sur un barrage édifié au début du XXe siècle — dans la maison du passeur, à l’extrémité du port, on retrace son histoire.
Au temps de la batellerie De Mauzac à Bergerac • De l’autre côté du port, une écluse marque l’entrée du canal latéral à la Dordogne : construit au milieu du XIXe siècle, cet ouvrage d’une quinzaine de kilomètres permettait aux gabares de rallier Tuilières en toute sécurité en évitant les redoutables rapides du Grand Thoret, de la Gratusse et des Pesqueyroux. À l’heure des hautes eaux, à la descente et à la remonte, défilaient ici les lourds chargements de bois, grains, papiers, fer et vins produits dans la région, ou bien de sel, sucre et épices aux origines forcément exotiques… Mais quelques décennies seulement après sa mise en service, le chemin de fer remplaça la voie d’eau, les élégantes embarcations cédèrent la place aux trains, les gabariers se firent cheminots… La fin, brutale, d’une longue période de traditions et d’aventures.
Bel endormi, le canal témoigne de ce que fut la Dordogne batelière grâce à un chemin de randonnée qui, partant de Mauzac, visite la bastide de Lalinde, le bassin de Port-de-Couze, le port et le pont-canal de Saint-Capraise-de-Lalinde avant d’aboutir au barrage de Tuilières, là où, grâce à un ingénieux escalier d’écluses, le canal rejoignait la rivière. On y trouve aussi un étonnant ascenseur réservé aux poissons migrateurs, et un parcours d’interprétation évoquant l’histoire du canal et des gabares.
Au cœur du Bergeracois
De Bergerac à Port-Sainte-Foy • L’histoire de Bergerac est indissociable de la Dordogne car si la ville s’est développée autour de son château, aujourd’hui disparu, c’est bien sur le port que se trouvait son cœur — un cœur gros comme ça, battant la chamade au rythme des escadres de gabares qui y accostaient.
À deux pas du port, les rues de la ville ancienne invitent à flâner parmi tant de belles architectures et de lieux d’histoire : cloître des Récollets, maison des vins de Bergerac, église Saint-Jacques, musées du tabac et de la batellerie…. Autre moyen agréable de découvrir autrement la vieille ville, la balade en gabare sur la rivière. Quant au chemin de halage, il permet aujourd’hui de randonner le long des berges jusqu’au barrage de Bergerac, puis de rallier Prigonrieux et même de pousser plus loin encore vers l’aval. Niché au fond du cingle qui porte son nom, le village du Fleix abrite d’autres témoins de l’activité batelière, notamment une cale et des maisons à pans de bois dont certaines ont été édifiées avec des planches et pièces de charpente récupérées lors du démontage des gabares…
Entre vignes et histoire
De Port-Sainte-Foy à Lamothe-Montravel • Face à la bastide de Sainte-Foy-la-Grande, Port-Sainte-Foy abrite le musée du fleuve et du vin de la Dordogne, qui raconte la rivière, le commerce des vins de Bergerac au temps des gabares, leur exportation vers l’Angleterre et la Hollande. Puis la Dordogne continue son chemin au travers de coteaux quadrillés par les vignes jusqu’à Montcaret, où sont conservés les vestiges et les précieuses mosaïques d’une villa gallo-romaine.
Pour se rendre à la Tour de Montaigne, il faut ensuite quitter la vallée de la Dordogne et suivre l’un de ses affluents, la Lidoire, qui fut un temps frontière entre obédiences protestante et catholique. Le philosophe Michel Eyquem de Montaigne vécut dans cette belle demeure, y rédigea ses fameux ‘Essais’ et y mourut.
Si le combat du 17 juillet 1453 (qui permit à l’ost française de bouter définitivement les Anglais hors du Royaume) a donné son nom à la cité girondine de Castillon-la-Bataille, c’est en réalité sur la commune de Lamothe-Montravel qu’il se déroula. Sur la berge de la Dordogne, une stèle précise que sir John Talbot, le chef du parti anglo-gascon, trouva la mort dans la mêlée ; elle nous rappelle aussi qu’en ces temps anciens, les Anglais appréciaient déjà l’Aquitaine !